Depuis l’accession au pouvoir présidentiel américain de Donald Trump, « Fake news » est la nouvelle expression qui fait la une des médias. Les articles abondent pour dénoncer ce que l’on pourrait définir comme des fausses nouvelles présentées comme vraies par leurs instigateurs et qui ont un impact sur la manière dont le public peut évaluer une situation ou la pertinence d’une décision.

La fake news peut être définie comme une fausse information. Peut-on alors dire qu’elle est un hoax ou une rumeur, termes souvent associés à des contenus fallacieux ? Cet article a pour double objectif de réfléchir aux points communs et différences de ces termes, et de pointer les difficultés auxquelles le citoyen est confronté lorsqu’il veut se faire une idée objective de la véracité d’un fait rapporté !

Certains utilisent l’expression « fake news » comme synonyme d’hoax ou canular. Pourtant, si le hoax est également créé sciemment et fait appel à la crédulité des publics, il a été conçu dans un objectif d’amusement, de blague ou de parodie. Il n’est donc qu’en de rares occasions le fait d’autorités officielles, sauf bien sûr le 1er avril !

Tournons-nous alors vers le terme « rumeur ».

Il est vrai que la fake news et la rumeur fausse instrumentalisée et avalisée par les autorités officielles peuvent être toutes deux classées comme contenus de propagande, de par leur utilisation par des politiciens, partis politiques ou lobbies pour influencer l’opinion en l’induisant en erreur sur des événements, des personnes ou des données.

Ces deux sortes d’énoncés reprennent effectivement des faits qui ont été réinterprétés de manière à ce que leur présentation devienne fallacieuse, ou des contenus faux créés intentionnellement ou repris et instrumentalisés dans des discours officiels. Ils peuvent être utilisés dans de la propagande à usage externe destinée à influencer l’opinion d’autres nations, armées, communautés ou groupes d’appartenance, et aussi dans la propagande à usage interne visant à influencer son propre peuple, armée, groupe d’appartenance en discréditant des adversaires internes ou externes désignés (minorités, médias, communautés spécifiques, groupes ethniques, etc.).

Dans ce cas, nous pouvons assimiler les deux termes. Cependant, toutes les rumeurs ne sont pas des fake news !

En effet, premièrement, la rumeur peut être vraie même si elle a été démentie par les autorités !

Deuxièmement, la rumeur est souvent simplement diffusée de bonne foi soit parce qu’elle apporte à ses diffuseurs une réponse intéressante à une question non-résolue, soit parce qu’elle leur permet de prévenir leurs proches d’un potentiel danger ou encore de diffuser des valeurs.

Troisièmement, la majorité des rumeurs est co-construite par les discussions desquelles elle émerge sans concertation préalable. Une minorité d’entre elles est créée de toutes pièces alors que, rappelons-le, la fake news est créée en grande majorité sciemment par un instigateur ou un petit groupe d’instigateurs et, dans tous les cas, est instrumentalisée.

Quatrièmement, dans le cas de la rumeur, les autorités officielles doivent « lutter » pour le rétablissement de la « vérité » puisqu’elles ne l’ont pas confirmée ou l’ont démentie. La fake news est, elle, créée ou instrumentalisée par ces autorités – généralement politiques ou économiques – qui chercheront alors à renforcer la crédulité de leurs publics dans son contenu et à éviter que ces publics n’enclenchent un processus de vérification de sa véracité.

Aujourd’hui, le citoyen se trouve donc confronté à de nombreux contenus à la véracité douteuse ou niée.

Il se trouve face à de la propagande composée de fake news et de rumeurs fausses instrumentalisées. Cette propagande ne se cache plus mais s’affiche comme telle quitte même à ne plus prendre la peine de donner l’illusion de véracité, par l’utilisation des expressions de type « faits alternatifs » (Alternative Facts)[1]. C’est ce phénomène qui attire notre attention dans l’actualité et qui fait les choux gras des articles de presse !

Mais, attention, cela ne s’arrête pas là. Le citoyen est tout autant confronté à des rumeurs instrumentalisés fausses mais non-avalisées par les autorités officielles, à des rumeurs non-instrumentalisées mais fausses, à des rumeurs non-instrumentalisées mais vraies, à des rumeurs vraies instrumentalisées par les autorités, et enfin à des rumeurs vraies censurées ou démenties par ces dernières.

On comprend mieux pourquoi le travail de vérification des faits (Fact Checking) est essentiel afin que le citoyen puisse se créer une opinion la plus objective possible d’une situation, d’une personne, de données ou d’une décision.

Pourtant, ce travail de vérification est confronté à trois problèmes majeurs.

 Le premier est qu’il n’est pas toujours possible car les données objectives ne sont pas toujours disponibles !

 Le second est que même une fois une fausse rumeur ou une fausse information est démentie par une source de vérification, il faut, pour qu’elle soit crue, que cette source bénéficie d’une plus grande confiance du public que celle qu’il accorde à la source de la fake news.

Le troisième est que même confronté aux faits, le public peut choisir de ne pas accorder d’importance au mensonge ou à la vérité. En effet, son adhésion aux énoncés d’une source peut reposer sur d’autres leviers – comme des opinions communes sur un sujet que venait renforcer la fausse nouvelle, l’adhésion au message implicite véhiculée par cette dernière, des émotions négatives suscitées par la partie adverse, etc. – qui peuvent donner l’impression « d’un moindre mal ».

Ces difficultés ne sont pas neuves mais nécessitent d’être prises en compte lors de toute initiative citoyenne ou pédagogique visant à lutter contre la propagation de fausses informations et à limiter leur impact sur l’opinion. On comprend mieux la difficulté auxquelles ces dernières seront confrontées !

Vous voulez en savoir plus sur le sujet, invitez-moi à donner une conférence ou un atelier où l’on verra comment vous pouvez réagir concrètement pour gérer les fausses nouvelles ou rumeurs et développer votre esprit critique!

Aurore Van de Winkel

[1] Expression utilisée en janvier 2017 par Kellyanne Conway, conseillère du président Donald Trump pour décrire les arguments fallacieux du porte-parole de la Maison blanche, Sean Spicer, concernant le nombre de personnes présentes lors de l’investiture du Président.

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